Actualités, Réglementation
Publié le : 25/09/2024 par Sofia KAZAKOVA
Aujourd’hui, la législation environnementale, qu’elle soit française ou européenne se veut de plus en plus ambitieuse avec la loi AGEC et la PPWR. Mais comment ces deux textes pourraient s'articuler ?
Parce que les deux textes traitent de certains sujets identiques (et/ou similaires) mais avec des niveaux d’ambition différents, sachant que la loi AGEC se veut plus ambitieuse.
Par exemple, le règlement « PPWR » prévoit que 100% des emballages devront être recyclables en 2030, tandis que la loi « AGEC » prévoit que tous les emballages en plastiques à usage unique devront être recyclés dès 2025.
De même, la France souhaite supprimer le plastique à usage unique d’ici 2040 tandis que le règlement « PPWR » ne possède pas de tels objectifs d’élimination, mais plutôt des objectifs de réduction.
En principe, la réponse à la question devrait être simple. Selon les règles de la hiérarchie des normes, un règlement européen est supérieur à la loi nationale et vient donc la supplanter. C’est la traduction directe du principe de primauté du droit européen. Ce principe est par ailleurs rappelé à l’article 4 du règlement selon lequel, notamment, les Etats membres ne doivent pas interdire, restreindre ou entraver la mise sur le marché des emballages conformes aux exigences du règlement pour des raisons de non-conformité avec les exigences nationales.
La réponse à cette question, à ce jour, est impossible. Néanmoins, nous avons quelques éléments de réflexion assez intéressants.
Dès les négociations relatives au futur règlement européen, la France aurait exprimé son envie de préserver ses acquis et conserver une certaine flexibilité dans la mise en œuvre des futures mesures européennes. La France semblait en effet mener les négociations avec un objectif : éviter notamment que les règles nationales, plus ambitieuses, soient écrasées par une application directe et exclusive de règles européennes.
Cette volonté aurait été notamment perçue lors des négociations relatives au choix de la base juridique du règlement. En effet, la Commission européenne, pour pouvoir proposer un texte, doit se baser sur une base juridique c’est-à-dire sur une sorte de « raison d’être » du texte. Et ce qui est extrêmement important de comprendre ici c’est que la base juridique d’un texte va établir le degré de flexibilité laissé aux Etats dans la mise en ouvres des règles européennes.
Ici, deux possibilités s’offraient concernant le choix de la base juridique :
La France avait plébiscité le fondement de la protection de l’environnement ou au moins l’intégration d’une double base juridique.
Parce que la base juridique « protection de l’environnement » prévoit la possibilité pour les Etats membres de déroger aux règles européennes dès lors qu’ils prouvent que leurs mesures nationales bénéficient davantage encore à la protection de l’environnement. Donc cette base juridique aurait permis aux Etats membres de conserver une certaine marge de manœuvre.
Pour de diverses raisons, la Commission européenne a fait le choix de la base juridique « marché intérieur ».
Le second élément de réponse à notre question se trouve dans les mesures du texte directement.
En effet, le président de la Commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI) – donc de la commission à l’origine du texte- avait déclaré sur ses réseaux sociaux le souhait du projet de règlement de laisser « la possibilité aux Etats d’aller plus vite et de mettre en œuvre des objectifs plus ambitieux que ceux du texte ».
Ce souhait s’est directement traduit dans certaines dispositions du règlement qui laissent aux Etats la possibilité de prévoir des objectifs plus ambitieux. Ainsi, concernant les objectifs de réemploi, les Etats sont autorisés à fixer des objectifs de réemplois plus élevés que ceux du règlement.
En effet, théoriquement, il serait possible de considérer qu’en fixant une réglementation plus ambitieuse, la loi française porterait atteinte à un autre grand principe de l’Union européenne qu’est celui de la « libre circulation des marchandises » au sein du marché intérieur. L’Europe et plus précisément la Commission européenne, pourrait ainsi engager à l’égard de la France, une procédure dite d’infraction, comme elle l’avait déjà fait pour le logo Triman, imposé lui-aussi par la loi AGEC. Un bras de fer, dont l’issue est difficilement prévisible, serait alors engagé…
Oui, nous avons eu un exemple concret le 4 juin. Pour la première fois, le Gouvernement français a tranché sur la question de l’articulation incertaine entre le règlement « PPWR » et les obligations françaises, reportant ainsi l’interdiction des emballages en polystyrène non recyclables de 2025 à 2030.
Pour conclure, l’articulation entre les deux textes reste à ce jour délicate et plu qu’incertaine. Seul le Gouvernement, avec l’aide de l’Europe, pourra nous donner les réponses à toutes nos questions.
Affaire à suivre ….
Cette rubrique relate simplement l’état de la législation/réglementation telle qu’elle existe au jour de sa rédaction et surtout telle qu’elle est comprise par nos services. Elle ne pourra en aucun cas engager ni la responsabilité du CTI ni celle du rédacteur. Aucune action ne devrait être entreprise ni aucune conclusion ne devrait être tirée sur le fondement du présent article et sans la consultation d’un conseil professionnel.
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